vendredi 2 novembre 2012

Colloque Les émeutes de la faim de 1847 à Buzançais

Le colloque Les émeutes de la faim de 1847 à Buzançais. Regards d’hier et d’aujourd’hui fut une grande réussite scientifique et une formidable rencontre populaire. Organisé par le Groupe d’Histoire et d’Archéologie de Buzançais (GHAB) le colloque bénéficia du soutien du Ministère de la Culture et de la Communication, du Conseil général de l’Indre et de la Ville de Buzançais.

Le samedi 27 octobre 2012, au début de l’après-midi, Régis BLANCHET[1], et Nicolas THOMAS[2] procédèrent à l’ouverture du  colloque.
Le Centre culturel Jean Bénard de Buzançais accueillait alors 164 personnes. Beaucoup de spectateurs étaient des habitants de Buzançais, mais plusieurs d’entre eux avaient parcouru plusieurs dizaines de kilomètres pour assister au colloque, venant de différentes communes de l’Indre (Châteauroux, Déols, Ardentes, Luant, Argy, Sainte-Gemme, etc.) et de communes encore plus éloignées comme Saint-Aignan (Loir-et-Cher), Tours (Indre-et-Loire), Bourges, Vierzon (Cher) ou Paris.
[1] Docteur en Economie, Conseiller général de l’Indre, Maire de Buzançais.
[2] Docteur en Histoire du Droit, Président du Groupe d’Histoire et d’Archéologie de Buzançais.



Ce très nombreux public commença par écouter la communication d’Yvon BIONNIER [1] intitulée Les émeutes de la faim de 1847 dans l’Indre. Yvon BIONNIER commença par rappeler les causes économiques des révoltes (deux mauvaises récoltes en 1845 et 1846), puis, il présenta les violentes émeutes que connut le nord-ouest du département de l’Indre au début de l’année 1847. L’intervenant examina ensuite le procès des émeutiers de Buzançais qui aboutit à trois condamnations à mort, un jugement dénoncé par nombre de contemporains comme George Sand, Victor Hugo ou Karl Marx.
[1] Administrateur-adjoint au Sénat.


Puis, Marc du POUGET[1] présenta Un libéral impitoyable chargé de la répression des émeutes de 1847 : Edouard de Vasson. Lors du procès des émeutiers de Buzançais, Charles-Edouard Girard de Vasson (1801-1882) fut, sous l’autorité de l’avocat général de la Cour d’appel de Bourges, un homme inflexible qui imposa l’exécution des condamnés à mort sur la principale place de Buzançais.
Après une pause permettant aux intervenants et au public de discuter, Daniel BERNARD[2] évoqua Le petit peuple des campagnes à la veille des émeutes de 1847, ce petit peuple de la région de Buzançais, aux confins de la Brenne et de la Champagne du Berry. S’appuyant sur une minutieuse recherche aux Archives départementales de l’Indre, il dressa un portrait économique et social contrasté des journaliers agricoles qui, redoutant le chômage et refusant de sombrer dans l’indigence, furent les principaux acteurs de la révolte de 1847.
[1] Directeur des Archives départementales et du Patrimoine historique de l’Indre.
[2] Docteur en Anthropologie sociale et historique.


En fin d’après-midi, Cynthia BOUTON[1], venue spécialement des Etats-Unis pour le colloque, apporta Le regard d’une historienne américaine. Elle montra que les émeutes de la faim de Buzançais se situent dans une longue histoire des mobilisations collectives et des débats politiques en France et que l’exemple de Buzançais est particulièrement utile pour étudier l’histoire de la politique de l’approvisionnement et des protestations populaires. Grâce à une grande diversité de médias, elle expliqua que les différentes interprétations des émeutes de Buzançais sont des renégociations des frontières entre l’économie morale et politique, les protestations légitimes et le crime, le droit à l’existence et le droit à la propriété, la violence collective, individuelle et le déploiement approprié de l’autorité.
[1] Professor, Department of History, Texas A&M University.


Le samedi soir, 94 personnes revinrent au Centre culturel pour regarder le film Le pain et le vin, diffusé pour la première fois à la télévision en 1978. Le film, réalisé par Philippe LEFEBVRE à partir d’un scénario de Pierre DESGRAUPES, fut analysé par Gérard COULON[1].Au cours de sa communication intitulée Le Pain et le vin. Quand la télévision raconte les émeutes de 1847 à Buzançais, il présenta les lieux du tournage à Beaulieux-lès-Loches, en Touraine, le recrutement des figurants (une centaine), le travail des décorateurs pour donner aux lieux un air d’époque, les comédiens dont Marc Eyraud, le fameux commissaire Ménardeau, adjoint du commissaire Cabrol dans les Cinq dernières minutes et Monique Chaumette qui débuta au Théâtre National Populaire dirigé par Jean Vilar.
[1] Conservateur en chef honoraire du Patrimoine.


Le dimanche 28 octobre, par une matinée très froide et ensoleillée, 65 personnes effectuèrent le parcours historique dans Buzançais intitulé Sur les pas des émeutiers. Animée par Yvon BIONNIER, les promeneurs munis d’un document réalisé par le GHAB partirent du faubourg des Hervaux, où les trois charrettes de blé furent arrêtées, pour traverser Buzançais, en passant par les Grands Moulins, les maisons pillées, particulièrement la demeure Huart-Chambert, et se retrouver sur la place publique où les trois condamnés furent guillotinés.

Le dimanche après-midi, les communications reprirent au Centre culturel Jean Bénard dans lequel 162 personnes s’étaient rassemblées.
Jean-Pascal SIMONIN[1] apporta Le regard des économistes au XIXe siècle. Les économistes cherchèrent d’abord à identifier les causes de la révolte de la faim de Buzançais, à expliquer les événements (la disette de 1846-1847, la politique du Ministre Cunin-Grudaine, l’insuffisance des moyens de transport, l’absence de réserves de grains). Puis, la référence aux émeutes devint un argument symbolique dans les débats opposant au XIXe siècle les partisans du libre échange des grains à ceux du protectionnisme agricole. Ainsi, l’affaire de Buzançais eut un impact énorme dans l’opinion publique.
[1] Professeur émérite de Sciences Économiques à l’Université d’Angers.


Par la suite, Kathy FERRÉ[1] interpréta un poème de Gaston Couté évoquant les émeutes de 1847 et l’une de ses créations, Brenne 1847, écrite pour rappeler l’affaire de Buzançais. Au cours de la pause, le public put, comme la veille, regarder les documents originaux du procès des émeutiers de Buzançais. Présentés dans une vitrine, ces documents furent prêtés par les Archives départementales de l’Indre. Abordant la question de la faim dans le monde d’aujourd’hui, Marie COUTANT[2] interpréta la chanson Voici extraite de son dernier album.
[1] Musicienne, poète.
[2] Auteur, compositeur, interprète.

La dernière communication du colloque, présentée par Nicolas THOMAS[1], aborda Les émeutes de la faim de 1847 dans les mémoires des Buzançéens. Par une enquête historique menée auprès des Buzançéens d’aujourd’hui, il démontra que les émeutes sont un fait ignoré de nombreux habitants de la ville, particulièrement des plus jeunes. La révolte de 1847 est l’événement de l’histoire de Buzançais le plus évoqué, commenté, interprété, mais les Buzançéens ne se sont jamais enorgueillis de ce passage de leur histoire. Les plus âgés ont éprouvé durant de nombreuses années un sentiment de gêne, de honte transmis par la mémoire silencieuse de leur aînés.
[1] Docteur en Histoire du Droit, Président du Groupe d’Histoire et d’Archéologie de Buzançais.

La  clôture du colloque fut prononcée par Jean-Louis LAUBRY[1] qui effectua une remarquable synthèse raisonnée de ces deux journées.
[1] Directeur du Centre d’études supérieures de Châteauroux.

Le colloque Les émeutes de la faim de 1847 à Buzançais. Regards d’hier et d’aujourd’hui fut le premier colloque d’histoire organisé à Buzançais. Il rencontra un incontestable succès scientifique et populaire. Les communications furent parfaitement complémentaires. En outre, la présence de 485 personnes sur les deux journées encourage le Groupe d’Histoire et d’Archéologie de Buzançais à organiser d’autres colloques dans les années à venir.